Translate

Affichage des articles dont le libellé est herbes. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est herbes. Afficher tous les articles

jeudi 26 octobre 2017

Les herbes (mais aussi le vent) par Jamadrou

Impossible ce soir d'importer des photos, l'administration a des problèmes !!!
Je verrai dès que possible, désolée, Jamadrou






1.

Des jours avec les herbes et le vent.




Il est sournois

il est bruyant

il est bourrasque

il ébouriffe

il fait grincer il fait claquer

il fait du bruit sur les ardoises

il fait courir les nuages

il fait s'agiter les grands cyprès qui crient et parlent avec les mains

ils en perdent leur Breton

et se mettent à parler Italien.

Il fait peur aux oiseaux qui volent de travers

il rend fou les têtes mordorées des hortensias

qui en perdent le nord

les voici  vraiment à l'Ouest!

Les herbes impassibles

se préparent à tendre les bras.

Là-bas  sur la mer

le vent valse au bras des vagues qui l'emportent

on dit qu'elles sont grosses

Vont-elles accoucher d'une tempête?




2.

La mer n'a pas accouché d'une tempête

En mousseline et organdi blanc

J’ai vu le mariage blanc de la mer et du vent...







3.

Pas de tapis rouge
Juste un tapis vert
Pour remercier
La pluie le soleil et l’instant






 



Organdis et dentelle
Le vent fait frémir la mer
Caresse l’herbe verte
Qui se redresse
Monsieur le vent a du toupet !






 


Les brins d’herbe tremblent
Ils savent bien qu’entre la mer et le vent
Ce mariage blanc
Est plus que complaisance
Il est histoire d’amour
Depuis la nuit des temps.










 

Je n’ai pas résisté
J’ai trempé mes pieds dans l’écume
L’herbe tendre m’a dit
« Pour sceller notre amitié
Je suis là pour essuyer tes pieds. »

Je ne mérite pas ce geste de tendresse
M’essuyer les pieds avec tes cheveux verts ?
Me crois-tu prête pour ce rituel ?
L’herbe a souri, elle a chatouillé mes pieds.
Et moi, j’ai compris.



 


4.

Hier le vent soufflait si fort
Aujourd’hui le calme est revenu
Demain sera un nouveau jour

Juste le ciel la mer
S’asseoir sur l’herbe courte
Un instant béni

L’ordre est revenu
Plus de vent et d’écume
Le vent ne rend pas fou

L’écume des jours
Quand l’herbe est ma complice
N’est que remerciements
Prière au vent à la mer au temps.





jamadrou © du 19 au 22 octobre 2017    (A fleur de mer)











la page de Luciole autour des herbes 87

 Voici la page de Luciole autour des herbes

 






Je ne vous oublie pas...









1er Jour : « La Grenouille »

L’Enfer tout entier s’est transféré dans mon Jardin. Ses élans incendiaires pavent de larges chemins de terre craquelée et d’herbe brûlée. Les arbres sales et roux se décharnent.
L’audace indomptable d’une longue file de fourmis traverse la poussière sans peur des caprices du bouillonnant soleil, sans se détourner de sa voie…
Une éternité caniculaire court sur les jours, et les nuits sont fébriles.. Les vents du Sud ont drainé tous les nuages sur leur passage….
De sécheresses en inondations, de cyclones en tsunamis…. Le changement climatique nous talonne !
Une utopie libertaire vaniteuse met au cœur des Hommes une hostilité farouche envers sa Terre nourricière, envers son frère….
« Un jour, une grenouille fut plongée dans l’eau froide d’une bassine que l’on porte à ébullition. La grenouille, fort surprise tout d’abord, s’habitua, s’adapta à la chaleur progressive et … finit ébouillantée ! »
L’Humanité est ainsi ! Elle sait « qu’elle est en train de cuire », mais elle persiste à rester « dans la marmite » au lieu de réagir.
« Al Gore » utilise cette fable en 2009 dans le film « une vérité qui dérange » pour illustrer la manière dont l’Humanité court à sa perte, si elle ne cherche pas les solutions adéquates au lent réchauffement climatique de la Planète.
Seul le lierre prospère ! Il déploie en tous sens sa profusion. En amant vorace, il dévore muret et arbres, se couvre d’insectes butineurs.
Et là, au pied du mur, au cœur de cette exubérance, s’épanouit une tendre pousse d’herbes, verte encore, comme un printemps de vie.
Le champ des possibles est immense !


2ème Jour : « Les bruits du monde »

Aujourd’hui, l’azur est si limpide que je pouvais presque apercevoir l’Éternité à travers les espaces.
Des espaces aux lentes métamorphoses en ce petit matin… Mon âme paresseuse porte mes pas vers le murmure feutré du lierre.
Pas un souffle de vent ! Tout est figé dans l’immobilité. Quelques bruits d’ailes dans les arbres, bientôt suivis par le joyeux gazouillis des oiseaux, vaquant à leurs affaires.
Les premiers rayons du soleil balaient déjà la Terre.
Tout autour des frondaisons craquèlent les feuilles mortes sous mes pas… Je vais rendre visite à mes Brins d’Herbe.
Témoins de la violence du monde et de la vie, ils se déploient avec ferveur dans la douceur de l’air, prêts à affronter tous les dangers sans se lasser.
Leur obstination sereine m’interroge. Simplement être !
Accueillir ce qui est. Accueillir l’éphémère de ce qui est, de l’instant qui passe et puis s’en va… même s’il me défait, même s’il me dérange. Accueillir la course du soleil sur un monde déclinant…


3ème Jour : « Le brouillard »

Durant la nuit, le ciel était tombé sur la terre.
L’incertitude grise d’un brouillard épais nivelle toutes choses et les noie dans un silence lourd et pesant.
La brume muselle le soleil… Seule une trace de jour tremblote dans la grisaille.
La terre boit l’eau du ciel avec avidité.
Perdue dans cet air matinal confiné, j’avance comme une étrangère dans mon Jardin, le corps revigoré par la soudaine fraîcheur.
Comme le monde ne cesse de tisser autour des Humains ses réseaux, le lierre lance ses bras fantomatiques dans l’infini gazeux, au dehors et au-dedans de la Terre nourricière…
Une araignée a tricoté le temps en une dentelle légère, comme une parure de diamants, entre les bras ligneux du lierre, sur le passage des insectes butineurs..
Le brouillard transforme la toile en piège à eau. Eau et toile s’entremêlent !
Dans un étrange clivage entre monde de soie et monde à soi, me revient brusquement la sage réflexion lue de Pierre Rabhi que j’apprécie beaucoup :
« L’Homme se trouve actuellement dans une série d’incarcérations. De la maternité à l’université, on est enfermé. Du bureau, on passe au « bahut ». Tout le monde travaille dans des « petites » ou « grandes » boites. Pour aller s’amuser, on va « en boite » avec « sa caisse ». Et puis, vous avez la boite où l’on stocke les vieux…. En attendant la dernière boite…. Existe-t-il une vie AVANT la mort ? »
« Nous ne quittons jamais le parc du bébé » suggère Idriss Aberkane. « Nous en créons d’autres, intellectuels, politiques… auxquels nous cédons notre volonté »… » (magnifique livre « le Cerveau »)
Tant il est vrai que se « faire une place » dans le monde actuel est rude. Chacun s’accroche désespérément à celle qu’on a, quelque soit le prix ! Sommes-nous libres ou bien conformes au moule du monde ?
Le presque visible, l’apparente réalité diluée que révèle le brouillard s’ordonnent selon le regard et la rêverie angoissée d’une grand-mère qui crie dans le silence ouaté.
Seuls les Brins d’Herbe, sous la magnifique rosace aérienne où se cristallisent l’eau en suspension de l’air, se redressent tout joyeux, ivres de la vie bue sur le fil fragile du temps….
Dans l’absence du jour demeure une lueur !


4ème Jour : « Métamorphoses »

La Vie est chose lente… et pourtant, pendant notre absence d’une dizaine de jours, mon Jardin s’est transformé !
Dans ce matin limpide, la respiration s’est rafraîchie et le crissement des feuilles est immense. Le vent a fait des feuilles rousses des amas sombres qui exhalent des fraîcheurs de sous-bois.
Que les choses sont belles quand la lumière les baigne !
Tout s’illumine de gaîté sous ce fragile ciel bleu. L’indolence qui s’étire, ivre soudain d’un rêve allègre, s’agite et s’ouvre enfin à l’amoureuse pureté de l’air.
Un oiseau invisible égrène inlassablement ses trilles.
A ma grande surprise, dans la paille rase et jaunie des herbes brûlées folâtrent des pousses d’herbes vertes emperlées de rosée.
Serais-ce enfin le baiser maternel de la pluie versée, qui serait entré dans la terre brisée par trop de flamboiements solaires ?
Un souffle qui court par-delà tant de millénaires jette ses semences dans la terre à nouveau féconde.
Cependant, l’air déjà regarde ailleurs… la lumière est changeante… et le soleil qui baignait éternellement dans l’or baille et s’évade dès 17 heures..
Il faudra bientôt prendre goût aux pluies glaciales, au vent tourbillonnant des chemins froids.
Le grillon a cessé sa chanson !

Les insectes bourdonnent toujours dans le lierre, et l’araignée s’est cachée… Sa toile s’illumine de pierres précieuses…


5ème Jour : « Tais-toi ! »

« Tais-toi, cesse de t’agiter » semblent aujourd’hui m’ordonner les Brins d’Herbe nichés au cœur du lierre.
Mes Brins d’Herbe murmurent des choses étranges.
Mes yeux aveugles essaient de les contempler. Je sais que je fais partie de tout ce qui vit, de tout ce que j’ignore… Se blottir dans leur  silence… Faire taire cet égo trop présent… Partir en rêveries sur les ailes du vent…
Remercier la palpitation de la lumière qui donne la vie. Les animaux, dont je fais partie, savent-ils qu’ils naissent de l’air, des végétaux, des eaux et même des pierres ?
Sans les végétaux, parure de la terre, celle-ci ne serait qu’un désert… Est-ce surprenant que leur apparition précède celle du règne animal ?
Je suis si fragile et dépendante… Les Brins d’Herbe respirent le même air que moi, mais ils n’ont pas besoin de moi… Je tire mon énergie des végétaux et de la chair des animaux qui… se nourrissent des végétaux… Mes vêtements proviennent de la laine des bêtes et des espèces végétales…
Tous mes futurs sont dans la graine, née du vent, de la lumière et des feuilles tombées, sous les gouttes qui tombent…
La terre est vivante sous mon corps immobile ! Sa respiration est ma respiration… mais la terre peut très bien se passer de la mienne…
« En faces des effroyables menaces que l’Homme fait peser sur lui-même, on doit se demander s’il pourra se sauver autrement qu’en se dépassant » (Jean Rostand)
« Sans la relation avec la Nature, l’Homme meurt à sa relation au monde et aux autres »



6ème Jour : « les néonicotinoïdes »

Après-midi bourdonnant auprès du lierre, dans la chaleur poisseuse d’un ciel d’orage…
J’ai l’âme en peine !
J’aimerais louer tout ce petit monde aérien, tout ce qui pousse, tout ce qui vit au-dedans et au-dedans de la Terre… par tous les temps… et dans le Temps… avec une obstination millénaire !
Aujourd’hui, l’avenir butte à demain ! Il est déjà presque trop tard !
« Un nouveau pesticide néonicotinoïde, le sulfoxaflor, vient d’être autorisé en catimi en France, vidant leur interdiction de 2016 de sa substance ». Leur toxicité est pourtant en cause dans l’effondrement des populations d’insectes, et leurs effets nocifs sur la santé humaine inquiètent (Libértion.fr) »
Oh bien sur, les sursauts coutumiers de la vie sont inévitables, mais là, je ne peux comprendre …
A peine la lumière perce-t-elle que les ténèbres l’avalent .  Loi interdisant ces pesticides en 2016 bafouée en à peine un an.
Et pourtant, les scientifiques affirment avec force et courage que ¾ des espèces d’insectes ont disparu en 30 ans (75% entre 1989 et 2017)…
Les études, les mises en gardes des scientifiques démontrent que les intérêts financiers de quelques uns passent avant la santé des populations. Le monde industriel a perdu le sens !
Les insectes rendent un immense service à l’Homme. Non seulement dans la pollinisation des fruits… mais également dans le nettoyage naturel… Comme dans mon Jardin, les « forêts vont se retrouver avec une litière de feuilles mortes en permanence sur le sol »…
Savent-ils, ces assassins, que certains coléoptères se nourrissent de bouses de vache, débarrassant l’herbe des pâtures de ces excréments qui condamneraient certains espaces pour les troupeaux ?
L’insecte est indispensable également à la nourriture des vertébrés insectivores comme les chauves-souris, les hirondelles et bien d’autres encore…
La mort des abeilles, des bourdons, des papillons et de beaucoup d’insectes est-elle programmée ?
Ces industriels cupides vont-il rayer 65 millions d’années d’évolution laborieuse de la
Planète ?
Tout en sachant que les effets de ces substances d’une très haute toxicité sur l’humain, notamment sur le développement du cerveau – surtout chez les enfants – inquiètent les spécialistes de la médecine… sans parler de leur impact sur les eaux !
Les lobbys sont puissants…. « Y a-t-il un pilote dans l’avion » ?
Finalement, je suis heureuse que mon Jardin soit d’humeur folâtre ! Les pissenlits et même les chardons sont si beaux quand ils fleurissent !
Il faudra qu’un jour je vous parle de mes 20 ans en symbiose avec les abeilles… avec mon mari apiculteur…. Abeilles qui portent la clé de l’Univers…
L’Homme s’éloigne de jour en jour du paradis terrestre ; sa cupidité est sans limite !
« Chargés comme l’abeille, les Hommes périront comme elle sans le butin doré qu’ils n’auront pu sauver » (Louise Ackermann – contes et poésies – 1869)


Luciole 83


 

jeudi 19 octobre 2017

Les pages autour des herbes - 87 par Jamadrou



Les pages autour des herbes - 87ème édition
Jamadrou



 

Pluie froide d'automne
feuilles et herbes se consolent
d'une mort annoncée.





Herbes en larmes
compatissante est la feuille
chagrin partagé.




 
 






Pas de tapis dans votre intérieur ?
Tissé, noué par des petites mains
Tapis Persan, tapis d’Iran, d’Inde, du Pakistan
Du Tibet de Turquie, du Maroc ?

Boucharouette aux mille couleurs ?
Même pas une toute petite carpette ?



 
- Non, moi, mon tapis est à l’extérieur
 il est vert
tissé avec amour par la pluie le soleil et la terre

Brins de vie et de lumière

Un tapis doux et frais sous mes pieds nus

Un tapis qui aime à être tondu

N’a jamais de poussière

Mais renferme tant de vies

Mon tapis vert c’est ma prairie!





2. un vendredi 13
 






Cueillir la chance
C'est voir par-delà le temps
Quat'feuilles rirent aux larmes.











4
 







Tisser sa toile
Enfiler des perles rares
Se rire du temps.







Jamadrou




Demain la page de Serge de la Torre



Et si vous avez des textes, l'herbier ne ferme pas la page des herbes (ce serait un comble ! non ?)


jeudi 12 octobre 2017

Herbes mouillées

  Les pages autour des herbes - 87ème édition




Herbes mouillées de Marine






Regarder un nuage
qui flotte sur fond bleu
fouler l'herbe drue
  
Tapis odorant
offerte et constellée
- folle avoine


Herbe attractive
veloutée sous nos pas
toujours renouvelée



Des herbes moussues
moustaches dégoulinantes
toilette de rosée


La pluie encore
repulpe la pelouse
qui avait séché



Tombée du ciel
l'eau a ravivé les herbes
et les ruisseaux




MarineD


mercredi 11 octobre 2017

Heures de hasard, herbes de pluie, par Jeanne Fadosi




 

Les pages autour des herbes - 87ème édition

par Jeanne Fadosi



Trèfle À Quatre Feuilles, Trèfle, ChanceHeures de hasard, herbes de pluie




dimanche 3 septembre, onze heures


Après les pluies de chaleur
les panicules du maïs

caressent le voile
estompant le soleil
pour le déchirer.




lundi 4 septembre, en début d'après-midi


Vaine quête de hasard
ils cherchent fortune
dans un trèfle à quatre feuilles

Les brins emperlés
scintillent dans la lumière
trésor d'abondance



mercredi 6 septembre, en début de soirée


Chronique vespérale

Le linge est lavé
Le soleil encourageant
Le vent polisson

Le faire sécher sur le fil
comme pour prolonger l'été ...




samedi 9 septembre, dix heures du matin


Soudaine et brutale
la rincée drue de l'orage
a fait fuir l'abeille




lundi 9 octobre, onze heures du matin


Pluies douces de la nuit
soleil tiède des journées
l'herbe est à la fête

en début de soirée

Petit peuple des herbes folles
gardez-vous de la tondeuse

onze heures du soir

Que fais-tu dans ma maison
jeune crapaud étourdi ?

Ignores-tu que le confort des gîtes humains est un piège mortel pour tes frères ? Le chat en a retrouvé un, il y a quelques semaines, dans les outils de jardin. Fuyait-il la canicule ? La nature, bonne fille, l'avait momifié.

Je te rends ta liberté
dans l'herbe fraîche des pierres.




mardi 10 octobre, dix heures du matin


Pluie et soleil au rendez-vous
de l'autre côté de la vitre
festin de roi pour le verdier.








mardi 10 octobre 2017

Les pages autour des herbes - 87ème édition

Par Adamante



 


Le journal des herbes

Sept jours de septembre 2017 à les contempler.

photo AD




Vendredi
Des perles de lumière sur les herbes.

En cette fin d’été parfumée d’automne, la pluie a maquillé les herbes. L’instant est unique, je suis sous le charme. Tout s’efface qui n’est pas lumière. Je voyage dans une pantoufle de verre* aux pays magique du strass. Je n’attends aucun prince. Et j’ai tout, absolument tout ce dont je peux rêver. Dans cette dimension, les richesses matérielles n’ont aucun sens.
Le diamant, conçu aux feux de la terre, masque sa lumière, le sage ne se répand pas.
Mais les herbes, par leurs racines, connaissent le grand dessous des choses, elles en témoignent. Je découvre la richesse de l’instant qui se donne dans cette symphonie du prisme que le vent balaie emportant avec lui une part de cet éclat d’éternité. J’ai déjà prélevé ma part. À l’éternité du diamant convoité par les Hommes, je préfère ce moment d’éblouissement fugace offert par quelques gouttes de pluie. Il vit désormais aux tréfonds de mes espaces intérieurs.
La Terre connaît trop bien la convoitise humaine. Qui porte la lumière doit la protéger des regards avides.
Voici l’enseignement des herbes ce matin et rien ne m’est plus précieux.

*et non pas vair, par choix délibéré.



Samedi

Regard

Pas de pluie à mon lever, juste la grisaille du ciel qui réduit les pensées, étrique les mouvements et pousse à la désespérance.
La sagesse serait de puiser à la source de lumière intérieure pour éviter l’écueil d’une journée maussade. De toute évidence je ne suis pas sage ce matin. Je m’assieds sur la marche du perron, regard vague et soupire.
L’herbe croît, plus verte que jamais. Je maugrée. Cet été qui n’en fut pas un, plombe mes pensées. Je pleure sur le froid qui perdure. Il manque au paysage cette touche de couleur chaude qui pourrait rasséréner le cœur le plus effondré. Blasée, j’observe. Et soudain, je vois. Je vois la diversité des formes et des verts. Mon regard éveillé brutalement par je ne sais quelle influence occulte, ne traduit plus une masse, mais une variété phénoménale de l’expression végétale que l’on qualifie d’herbe. Dire que je marche dessus à chaque instant, ignorante des formes et des noms sous le vocable générique d’herbe. Vocable réducteur, témoin du survol de la vie quand on porte des œillères. 
Les herbes ! les femmes ! les jeunes ! les étrangers ! les autres !
L’ensemble est à maudire, taillé comme un jardin français, il réduit à la masse ce que l’on croise. Qu’il soit érigé en critère esthétique ou social, il soumet, dompte, réduit, classifie, refuse, rejette.
La nature se plaît à varier les formes, l’humanité à les réduire. Peur de la différence sans doute !
Encore un enseignement des herbes, la liberté ne s’acquiert que par l’expression libre des formes. La variété est richesse, elle se tisse comme une tapisserie opposant ainsi l’art au bloc.



Dimanche

Le juste milieu

Une matinée ensoleillée ; s’élancer vers la lumière semble être le mot d’ordre du matin. Tout pointe qui se trouve au centre, mais à la périphérie on s’incline gracieusement vers la terre nourricière. Il apparaît que les plantes, et dans ce cas précis, le chiendent considéré comme une mauvaise herbe, dans leur inconscience apparente et leur mutisme, appréhendent mieux que l’Homme la notion de reconnaissance. Sur une même pousse, le centre salue le Soleil et la périphérie la Terre pour croître harmonieusement. La vie a des règles lorsqu’il s’agit de trouver l’équilibre.
Je me dis que pour progresser sur la voie de la modestie et de la compréhension de notre monde, nous avons beaucoup à apprendre du moindre brin d’herbe. À condition de se poser un instant et de se laisser glisser vers une attention sans but, toutes les sagesses nous sont enseignées, sans mot.
Cela remplit l’esprit, ouvre le cœur, apaise.
Il n’est rien de plus simple et de plus délicat à trouver que l’harmonie.


Lundi

Flash

Temps couvert, une sorte d’attentisme dense et silencieux recouvre la campagne. Sous le couvercle du ciel, l’heure est à la méditation. Les hautes herbes s’alanguissent, mélange de couleurs vert et paille, aux pieds des rosiers. Leurs flèches maternelles ont déjà rendu leurs semences et la terre a rouvert ses greniers, partout la récolte.
La pente involutive est amorcée, voici que sonne l’appel des terriers, le grand retour à la matrice. Doucement le sang s’alourdit et le mouvement s’apaise. Comme elle est douce cette contemplation des herbes ce matin.
Pendant ce temps, le monde tremble, la Corée du Nord vient d’expérimenter la bombe H… L’humanité, électron libre de la nature… Une erreur.
Une tourterelle, révélée par le bruit métallique de ses ailes, se pose non loin de moi, au pied du tilleul. On se regarde, elle n’a pas peur. Dans sa robe pastel teintée de lilas, elle incarne la douceur, la fragilité. N’est-elle pas une sorte de colombe ? Un symbole roucoulant de la paix ?

Quelques plocs se font entendre. Des oiseaux se baignent aux pierres de mesure en granit remplies d’eau. Dans ce lieu, ce fouillis, plein de vie, tout est sérénité. Ici, rien n’est à l’équerre, la vie s’exprime sans fard, sans faux-semblants.
Non ! je ne cèderai ni à la désespérance, ni à la mélancolie. Soudain un flash m’illumine, je sais, comme on sait une évidence, demain appartiendra à ceux qui auront conservé cette part de nature sauvage au plus profond de leur être.
Concours de circonstance ? Le soleil, absent depuis le lever du jour, fait brusquement son apparition. Je remercie les herbes, ma racine d’éternité vient de s’indurer encore plus profondément dans l’espoir.
Tout est clair, le temps est venu pour moi de récolter ma vie pour le partage.




Mardi

L’histoire sauvage

J’ai lu dans les empreintes des pattes d’un oiseau, là, sur le monticule de terre d’une cheminée de taupe, tout l’impossible des herbes, l’histoire sauvage. Une racine, quelques tiges, l’attachement à l’essentiel. Fragilité qui s’accroche à la source de vie, têtue et confiante.
Herbes, langues d’oiseau, porte-parole de l’amour en eau et lumière, en sève, en stigmates et pistils, en pollens-brouillard diffusant leurs gamètes en vibrations fertiles.
La vie est son, porté par le silence. Rythme lourd de la matrice accordé aux tambours des chamans.
Voilà l’enseignement des herbes révélé par une patte d’oiseau sur le sol aujourd’hui.



Mercredi

Après la pluie


Après toute cette pluie, la pomme pourrit sur l’arbre et l’herbe verdit.

L’océan végétal  s’incline en vagues harmonieuses. La chevelure de la terre pousse drue, libre, sensuelle. L’œil bercé par ce flot est aux anges, l’esprit se relâche dans la contemplation. Un paradis chatoyant de verts est descendu dans mon jardin où quelques pissenlits explosent leur dentelle, tandis que leurs cœurs palpitants espèrent en secret l’élixir du soleil.
-Silence ! l’entends-tu cette voix des mondes qui se conjuguent, s’unissent, se tissent dans l’abolition des frontières ?
-J’entends ! Je suis herbe et je danse !
-C’est toi ! l’herbe qui chante les herbes, comme une abeille chante la fleur au printemps.

Après toute cette pluie, la pomme tombée nourrit le merle et l’herbe me nourrit.



Jeudi

Danser sur les plates-bandes

Quelques touffes d’herbes s’enchevêtrent dans les premiers frimas. S’unir pour résister, chez les herbes aussi il semble que ce soit la loi. Voilà ! l’Homme découvre enfin que l’entraide et la communication font aussi partie du règne végétal*. Lui, qui dansait sur les plates-bandes sa grande gigue de la suffisance, en croyant tout savoir se trompait !
À chaque jour sa vérité en somme ! Cela nous laisserait-il quelque espoir ?

Merci les herbes de tant d’enseignements. Voilà qu’au bout de sept jours, je vous observe avec un regard neuf. N’est-il pas temps de se reposer un peu pour assimiler votre enseignement ?
À bientôt vous revoir, Mesdames, que l’hiver qui s’annonce vous soit clément.


* voir "la vie secrète des arbres, ce qu'il ressentent, comment ils communiquent" Peter Wohlleben
  Ed. Les Arènes

photo AD

lundi 9 octobre 2017

Cinq jours en herbes

  Les pages autour des herbes - 87ème édition


Photo AD


Cinq jours en herbes de Jill Bill



Le premier jour :


S'il pleut mon enfant
C'est qu'un nuage baleineau
Apeuré dans l'orage
Verse des larmes de crocodile...

Il pleut, ça mouille
C'est la fête au vendeur de parapluie
Ce faiseur de baleines
Monsieur John, as du pébroque... 






Le second


Rose dans la brume
Offrande sur une tombe fraîche
À la manière d'une pleureuse
Tête basse
Verse ses larmes, une par une
Toc,  toc,  toc,  toc...
Qui vient là, dit le macchabée



Le troisième


Rosée en perles
Piégées dans la toile d'araignée
Se fait rivière au parc,
Comme dans la vitrine
D'un joaillier parisien...
Seule une femme statue
En reste de marbre !



Le quatrième


Perles de pluie
Sur le toboggan d'une herbe
Glissent comme des gamins...




Le cinquième


Sous la feuille d'automne
Rouge parapluie
Moineau transi patiente
La fin de l'averse...
La grenouille à la fête
Danse avec son dieu Tlaloc...