Translate

Affichage des articles dont le libellé est étang. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est étang. Afficher tous les articles

vendredi 14 octobre 2016

L'herbier page 51

La vie, l'amour, la vie. Surtout la vie face à l'ombre et ses menaces. C'est selon...

Une photo de Susi S



Puisque l’horizon se bouche d’une noire prophétie, je m’arrête en chemin. Je regarde les volutes d’un feu qui s’éteint. Sous l’ombre des arbres, je déchiffre le langage de fumée. L’eau se trouble. Je reste calme, à l’abri d’aujourd’hui, sans penser à demain. Le miroir du ciel agite ses ondes. Les heures passent lentement. J’attends le soir, le noir, puis j’attendrais le jour, le réveil du soleil. Il reviendra avant que je ne me lasse de décrypter le langage naturel de la vie qui s’écoule…

ABC       



Selon que vous soyez...


Au-dessus du lac
Tel un troupeau
En transhumance
Passent les nuages
Au ras de l'onde
Et les arbres
Comme des filets
Se font pêcheurs
Pêcheurs de nues
Pour le poète...

Meringues
Ou îles flottantes
Pour le bête mangeur...

L'indifférent passant
Presse le pas lui,
L'orage menace
Peu lui importe
La poésie ou la cuisine des cieux...









À la tombée du soir mangé de nuages, quelques ombres tremblantes se noient dans l’étang. Des branches fantomatiques semblent surgir de ses eaux bouillonnantes et glacées qui phagocytent les dernières lueurs du jour. Des monstres sommeillent dans leur lit d’algues et de vase. Dès la nuit, ils s’éveillent et, revêtus de brume, disposent leurs filets d’angoisse et de terreurs dans la profondeur des eaux troubles. Sous la clarté lunaire, on voit les berges se couvrir de linceuls, un frisson d’épouvante court sur les herbes. Ici une autre vie, sans chaleur et sans pulsation, est à l’affût. On prend la fuite, il n’est pas l’heure, on s’empresse de retrouver lumières artificielles et bruits qui rassurent. On tire le voile, on parle haut, tellement heureux d’être encore vivant.








Cette carte postale, je l’ai reçue ce matin.
Au dos, elle avait écrit :
« Croire que la vie est un rêve est tromperie.
La vie n’est que le reflet de Ton rêve où chaque nuage se transforme en friselis et où l’arbre est ton cadre de vie.
Continue à les aimer ces arbres dans la solitude de ton île-forêt.
Moi, je pars seule, j’aime trop le mouvement de la vie. »







Premières lueurs sur l'étang
le pêcheur vient pour ce moment.
Les canes à pêche et l'épuisette
Pour le sport ou en alibi.
L'air est saturé des bruits
que l'homme des villes
n'entend plus :
chants d'oiseaux
bourdonnements d'insectes,
risée du vent.

Dernières lueurs sur l'étang.
toute une journée protégé
de l'effervescence du monde.
Les canes et l'épuisette sont rangées.
Le pêcheur fait réserve
de ces derniers instants de vie
Quand le jour fait silence
avant les murmures du soir.











Au seuil du jour
Ricochant sur le lac
Les notes du rossignol
.
Chuut
Juste le bruit de l'eau
Et ton cœur près du mien

      Martine Richard







Le Matou


Elle contemplait    l'orage menaçait     Elle se leva   frissonna   ramena son châle sur ses frêles épaules

Encor un peu dit-elle à haute voix  elle se rassit

pour contempler    encore

Il était bien caché le minet     Cherche   cherchez   et vous me trouverez

La narguait-il ?

Il est toujours là où je ne l'attends pas

le bonheur

se dit-elle

Vu ! 

l'avez- vous

vu le minou ?

en haut, tout en haut         sacré filou !

à nouveau   elle se leva 

comme je serai bien à l'abri à regarder tomber la pluie

se dit-elle

Françoise Isabelle La vieille marmotte     

 




Le coin des retardataires



Crépuscule en noir et blanc,

Noir, comme le lieu où toutes les couleurs se résorbent, blanc comme le lieu où chacune s’origine. Entre les deux, volutes de gris, comme une queue de paon en parade.

Le jour a flambé, ses dernières lueurs s’effraient.
La nuit installe sa traîne encore incertaine, comme une mariée le fait de son voile d’innocence.
De lointains nuages font, aux lueurs mourantes, comme un dard.
Le scorpion du temps instille au crépuscule son poison de ténèbres
Et lui destine des germes d’orages.
Des branchages encadrent la vue de l’observateur, l’horizon fini de terre
S’ouvre au ciel sur un infini possible.
Mais l’immédiat est un masque,
Il donne au visible une trop forte apparence.

Le lointain, lui, suggère sa forme comme une mémoire sans substance.
Dans ses incertitudes se tapit, reflet sourd, l’angoisse.
Sous l’eau règnent plus encore qu’au dehors,
Mille formes ignorées,
Corps sans corps, formes inconscientes.
Le baigneur se risquerait, à la fin,
À la rencontre qui lui fait peur :
Rencontre vitale ?
Rencontre mortelle ?
Qu’importe !

Là-bas, en face, entre réel illusoire et mémoire lointaine,
Une île dresse ses fûts, élévations rectilignes.
Comme des humains, ils empruntent à l’eau et à la terre
Et baignent leurs cimes dans des cieux où la différence ne veut plus rien dire d’autre,
Qu’être et se tenir.
Le spectateur, « invisible moi » qui s’oublie dans la vastitude des choses,
Éprouve enfin son insignifiance.
C’est en elle qu’il trouve son repos.
C’est en elle qu’il trouve quelque sagesse :
Prémisse des douceurs et des trop rares bontés.

Dans cet « à quoi bon !» qui, enfin, lui dit
Que la vie d’un homme est, si fort, sans signifiance,
Qu’il est bien absurde de haïr.
Regarder est une audace,
Où voir est une folie.
L’homme est-il fait pour vivre ?
Est-il fait pour la force si magnifique du monde ?





Au-dessus du lac
Serpente un ciel ivoire
Ses reflets dans l'eau sombre
En traînées scintillantes
Font route vers l'ailleurs
Où la nuit enveloppe
Toutes les angoisses
Toutes les peines
Où les rêves vibrent
Comme feuilles en automne


et


Le soir descend aux rives secrètes
De l'étang qui accueille les esprits
Seuls les nuages veillent encore
Sous la lueur masquée de la lune







mardi 2 février 2016

L'herbier de poésie page 32



Voici  une très belle moisson de brins, autour de l'étrange.

Merci à toutes de votre participation et à Susi S pour cette image qui a su éveiller ce florilège poétique. AD















Il est des nuits...



Tels des flambeaux éteints

S'embrasant au feu
D'un soleil couchant,
Ku Klux Klan nocturne
Cérémonie macabre
Sous la noirceur des cieux...

Il est des nuits
Où le hibou
Reste au creux de l'arbre
La grenouille
Au fond de la mare
Le mulot
Sous terre
Le fantôme
Au château
La bigote
Au fond du lit...

Il est des nuits
Qui lèvent 
Des armées de roseaux ;
Il est de nuits
Dans les marais
Où l'oeil du diable
Ordonne on ne sait quoi...





Baudelaire, en son spleen, abandonna son ciel bas et lourd, sur un champ de roseaux. Au miroir d’un étang, les ombres de leurs épis trouvèrent un rayon de lumière, laissant jaillir, dans le noir, les forces de la vie…
©ABC



Le dernier soleil
s'est piqué à la quenouille
pour dormir cent ans









Ils avancent sans peur, se hâtent.
Les premiers ont trouvé le chemin vers la lumière.
Il ne faudrait pas que la nuit se referme avant qu'ils aient eux aussi franchi le pas. 


©Quichottine





Dans le fond opaque du marais
Quand le ciel s'obscurcit
Les sentinelles du soir
Gardent l'encre des vies aquatiques
Se livrant au dictat du couchant
Qui, l'espace d'un instant 
Coiffe son auréole incendiaire
Tandis que le ciel violine
Brulé de ses derniers rayons
Abandonne la lutte
Il laisse la place aux sorcières
Pour une nuit de sabbat... 



Les roseaux près du ponton


L’armée des roseaux monte la garde près du ponton. 

Qui s’en vient ou s’en va par la porte du ciel ? Que cache cette lumière aveuglante entourée de ténèbres ? Aspire-t-elle la vie sidérée et muette, le flot interrompu des eaux de la rivière ? Crache-t-elle des révélations à ce peuple subjugué dressé vers le passage ? Rite ou curiosité de l’ailleurs ? À moins que ce ne soit la même chose, le désir de savoir.


Un grand prêtre officie, consumé d’absolu. On croirait une icône récipiendaire d’un secret inscrit sur les pierres d’un édifice en ruine marquant la limite entre deux Univers.

Le bois des planches humides a la couleur des nuages, un gris de cendres refroidies rompant avec l’or des roseaux. Décor griffé de joncs et de branches dénudées. Il se joue là une scène à la fois grandiose et banale. Captivante perception du monde des métamorphoses. Un visage apparaît au travers de la fumée céleste, il chapeaute les ruines, observe la troupe des fidèles avec ce manque d’aménité propre aux dieux de l’Olympe. Derrière ce masque, l’imaginaire déchaîne sa crainte, son effroi. Cette vérité inscrite au plus profond de tout ce qui est animé du souffle ne trouve aucun mot pour s’exprimer. Un frisson l’accompagne, le froid, la mort.

Il n’est pas une herbe, pas une goutte qui ne s’incline devant cette magie ruisselant de l’œil du ciel.


©Adamante 





Face au Levant
Tête nue filetée d'or
Le roseau se dresse
Lui
Et ses frères
Foule oscillante
Emergeant des rêves épars
Des traquenards bleus
Abandonnés par la Sorgue.
Salut au soleil
A sa chaleur
A la vie... 






J’ai traversé le temps, j’ai traversé les terres. 
J’ai vu les hommes noirs debout dans les bayous, cherchant au loin la lumière pâle qui guidera leurs pas vers la liberté.
J’ai traversé les marécages la peur au ventre.
Je n’ai pas saisi le bruit des clapotis dans le noir du soir.
Le bruit sourds des pas dans les massettes à larges feuilles.
J’ai traversé le temps, j’ai traversé les terres, j’ai cru entendre le sifflement des machettes.
Oui, j’avais la peur au ventre.


©Jamadrou





L'Attente.
Ils étaient vingt et cent, ils étaient des milliers
Lances-étoupe et bâtons, prêtes à flamboyer
Le choeur lourd des esclaves est encor en éveil,
Un seul geste devant
Vers un ciel entr'ouvert .....






Dans cette nuit lunaire
Que rien ne trouble
On entend la lente mélopée d'une geisha
qui s'accompagne au shamisen;
En fermant les yeux,
Elle rêve à l'Amour
Et qu’à son bras droit,
Elle se laisse entrainer au rythme d'une danse
Au pas nonchalant et sensuel...


©Tootsie



Pareille au vent, une longue mélopée dans les noires ténèbres, un appel, une secrète connivence entre les fiers guerriers ... qui persévèrent dans l'attente.

Trajectoire d'une complicité toute en filigrane aux résonnances insondables, reflets et moires, que le temps sans cesse rassemble ! 
Interminable attente !

Sagesse, respiration de tout un peuple, le chant s'élève et chemine dans le Cœur collectif.

Parfois le doute s'installe. Ils ne luttent plus avec le même enthousiasme. Tout paraît vain ...

Imperturbables, ils se reposent et reprennent force, puis l'Harmonie se recompose, animée par une mystérieuse entente contre la Conspiration des Ténèbres. 

Durs efforts sur eux-mêmes !

Magie des sons minutieusement réfléchies agencés, répercutés vers un impalpable Infini, pour échapper aux griffes de la Mort...

Il y eut un Avant : Espérance d'un Après ?!
Celui qui se révèle dans leurs rêves... Etrange télépathie entre les guerriers : hypothèse d'une autre Vie - mot de passe de l'évasion ? Ils cherchent la Voie ! Dressent leurs antennes et sondent le ciel. Ils veulent croire à l'immense Force de leur rêve collectif.

Sans amertume, ils donnent le meilleur d'eux-mêmes... Leur mélopée vibre de leur courage. Leur volonté couvrait le monde.....

Et soudain, une clameur immense ! Dans les ténèbres qui les submergeaient, une explosion de joie ! 
De l'onde croupie jaillissait une fantastique gerbe de Vie, puis une Porte de Lumière qui flamboyait dans la nuit... 

Qui a dit que la Vie était un Songe ? Était-ce un rêve de papillon ?

Le rêve des guerriers les poussa en avant, peu importe les difficultés du chemin et l'étroitesse de la Porte... 

Les guerriers jubilaient ! Il y a des moments où il faut agir, revêtir l'amure indestructible de l'Espérance et s'en aller comme une eau qui coule vers son Lieu sacré... 

©Luciole 




À titre exceptionnel ce mardi et bien que la communauté ne les accepte pas, 
j'ai dégagé un petit coin pour les rimes :




Dans le tunnel 

Elles attendaient

Soudain réveillées

En rang serré

Les ombres avançaient

Vers la clarté
Mais du soleil
Ce n'était que le reflet
Elles se précipitaient
Et se sont retrouvées
Au fond de la grotte
Sans comprendre
Qu'il ne se passait
Qu'un voyage
Au bout de leur nuit