Installez-vous confortablement, prenez le temps de lire et de vous laisser emporter dans des rêves de pluie.
La pluie...
Un temps chagrin
Déverse sur la ville
Son humeur chagrine
Il pleut comme pleurent
Des pleureuses
Veillant un macchabée...
Il pleut
Comme vache qui pisse
Il pleut des cordes, des hallebardes...
Il pleut, dans ma maison,
Ploc, ploc, ploc, note monocorde
Fait la pluie au seau
Ploc, ploc, ploc, même ton,
Ploc, ploc, ploc...
Par la lucarne du grenier
Je guette l'éclaircie bleue...
Ploc... ploc... ploc... et puis plus rien,
La pluie lugubre se tait
L'oiseau chante, tchip, tchip, tchip
Et moi je siffle...
<< Une femme chaque nuit voyage en grand secret >> Paul Eluard.
<< Une femme ....
Elsa, la quarantaine, chausse ses lunettes. Elle est vêtue de son tailleur grenat en laine. Nous sommes au coeur de l'hiver ; la nuit va être froide. Soigneusement maquillée, ses cheveux châtain clair retenus sur la nuque par une large barrette d'écaille brune. Elsa saisit son répertoire téléphonique : sa mémoire lui fait parfois défaut. Il faudra que je mette ce numéro parmi mes privilégiés, se dit-elle, je gagnerai du temps en n'appuyant que sur une seule touche ! A la lueur de la lampe qui éclaire doucement sa modeste pièce de séjour, ses yeux d'un gris-bleu intense parcourent les numéros à la lettre C ... Voilà. Ses doigts experts composent 04 78 69? 58 57 ..... La voix qui coule dans son oreille amène sur ses lèvres un sourire de satisfaction. Elle enfile son manteau, se coiffe de son chapeau de feutre noir "kangoo", et s'emmitoufle dans son châle aux motifs fleuris. Elle enfile ses gants ....
<< Une femme chaque nuit .....
Elle jette un coup d'oeil à la pendule. Non, elle ne sera pas en retard. On ne l'attendra pas trop longtemps. Elle va pouvoir sauter dans le bus de 21h10, comme chaque soir Elsa se prépare à la rencontre quotidienne. Préparer son coeur se dit-elle, être attentive, complètement, oublier la journée et ses tracas. Les flocons de neige qui commencent à virevolter rafraichissent son visage, ses joues rosies par la chaleur intérieure.
<< Une femme chaque nuit voyage .....
L'autobus de 21h10, précis, s'arrête à la station Séverine. Il y a peu de monde à cette heure, et par cette saison. Elsa choisit toujours la même place. A l'avant. Près de la vitre gauche. Derrière le conducteur. Prêter toute son attention aux lumières de la ville lui permet de faire le vide dans sa tête et de mieux se préparer à la rencontre de chaque nuit. Parfois, quelque scène comique se déroule sur le trottoir que longe le véhicule. Un sourire amusé illumine alors ses traits fins. Bientôt, elle sera rendue à destination : la maison cossue, en banlieue. La grille en fer forgé quelle va pousser. Le jardin qu'elle va traverser. La porte éclairée qu'elle va ouvrir après deux coups brefs sur la sonnette, à droite.
<< Une femme chaque nuit voyage en grand secret ...
Personne, dans l'entourage d'Elsa ne connaît ce qu'Elsa va faire dans cette banlieue lointaine et déserte à cette heure. Elle ne souhaite pas en parler. C'est son jardin secret ..... Soudain elle se hâte. Quelques mètres à peine la séparent de l'arrêt où elle est descendue à la maison cossue Son coeur commence à vibrer du plaisir qu'elle éprouve à chaque rencontre. Même au coeur de cette nuit d'hiver rien n'a bougé. Au fil de chacun de ses voyages, seule la nature amène quelques changements qui rythment les déplacements d'Elsa : Il fait plus chaud, les arbres retrouvent leurs feuilles, les fleurs du jardin embaument ..... Elsa va tout à l'heure poser un baiser sur le front de la vieille dame qui l'attend, assise dans son fauteuil, sa couverture à carreaux rouges et verts couvrant ses jambes désormais inutiles. Elsa va lui raconter, par le menu, avec mille détails, la vie du dehors. Ce sera la valse des mots ... Les phrases entrecoupées de longs silences ... Rien ne bouge ...
Ce soir encore, Une femme chaque nuit voyage en grand secret.
La vieille marmotte
Bleu nuit.
Il y a des jours, il y a des nuits où la fenêtre de notre cœur pleure. Gouttelettes transparentes qui tracent dans le bleu nuit, des sillons vers le noir. Rides du temps qui plissent et mouillent le bleu ciel. Pastels tendres qui se diluent dans la poussière du temps. Et puis, il y a des jours il y a des nuits où l’horizon s’éclaircit, une lumière si douce si calme attire gouttelettes de pluie et fumées obscures pour lentement, un à un, effacer les barreaux de notre fenêtre, fenêtre qui s’ouvre alors, sur un monde éclairé et serein.
Jamadrou
La fenêtre est bleuecomme le rideau bleuje suis au chaudje vois des bleusle dehors et le dedansen fondus enchaînésla pluie ruisselle au carreaumon spleen s'en mêlebleue la chambregris le tempsnuances subtilescombien sont-elles ?Le peintre a touché les couleurset j'admire celui qui oubliele dehors et le dedanspour créer une imaged'un gris qu'il cherchequi n'est qu'en luiclair dans sa têtegris de Payne
et aussi :
Sur la vitre la pluie a tracé
des crapauds griffus
au regard aveugle
derrière les barreaux veillent
des pieuvres flottantes
des vigiles masqués
armés de pieux
harnachés de lames
qui guettent leur proie
dans l'ombre bleutée de l'épouvante
Ciel haché de bleu
- si bien derrière la vitre
quand tu es là.
Josette
Quelques pleurs
sur ses dernières cigarettes -
dehors l'éclaircie
ses cendres fument encore
et se dispersent les ombres
des larmes du désir
laisser derrière soi
le mal qui ronge -
la brume se dissipe
ABC
Seul miroir de sa geôle
là-bas, dans les douves
pâle reflet de son ombre,
les noirs barreaux de malheur
et ses larmes
MétamorphosesIl pleut. Dans l’air froid et triste, le quotidien paraît sans saveur. Le regard, indifférent comme fixé au-dedans, retiré dans les profondeurs, accompagne les gouttes qui suivent sagement la loi de la pesanteur, se coller et glisser par la voie la plus rapide. Mais parfois, est-ce à cause du flot qui ralentit la course, une goutte hésite, dévie pour suivre un chemin parallèle, ouvrir une autre voie, explorer l’inconnu. Elle quitte le rail.
Mais déjà, dans l’univers limbique, le ballet hypnotique imprime ses images. Derrière le regard inconscient la vigilance est en éveil. Elle interprète, crée, s’abstrait de la routine, enfante la magie. Alors sur le carreau perlé de pluie, des chevaux d’écume pénètrent le champ visuel. Ce tsunami hippique exprime la métamorphose. Rêve d’une petite couseuse attendant son époux que quelques sirènes informes, à peine esquissées, retiennent par la voix dans l’univers épique d’un mythe.
Là, la faim se cache, non « dans un champ pierreux » où grincer des mâchoires, mais dans un tourment d’ondes vomissant des démons prêts à dévorer le héros assoupi.
Là, la faim se cache, non « dans un champ pierreux » où grincer des mâchoires, mais dans un tourment d’ondes vomissant des démons prêts à dévorer le héros assoupi.
Le char des légendes Ovidiennes surgit, éclaboussant le matin. Il s’effacera au premier rayon du soleil.
Dans la chambre aveugle « Ulysse » poursuit son rêve, il dort. Il est trop tôt.Dans la cuisine « Pénélope » attend, tout engluée de nuit. Devant son premier café, elle tente de s’extraire de ses limbes.
Adamante
Un commentaire de "la vieille marmotte" que je signale, un lien à ne pas manquer si vous aimez Chopin et Georges Sand :
"À la lecture de cette riche page, à l'écoute de cette chanson de Roger Caussimon (j'aime) je me souviens des "Gouttes de pluie" de Chopin. Permettez-moi de partager un de mes articles rédigé en Juillet 2013. Belle la musique de Chopin. Intéressante la version de George Sand !"
Admirative je le suis de vos écrits... encore une cuvée qui se déguste avec plaisir, bravo à tous et merci à toi encore !
RépondreSupprimerAdmiratives, nous les sommes, des tiens, Jill. Merci de ta présence et merci pour toutes.
SupprimerBelle diversité encore une fois... La pluie a été la dominante, moi c'est la fumée qui m'a sauté aux yeux.
RépondreSupprimerEt quelle fumée ! Une atmosphère qui nous enveloppe -proche de celle du haïku de Josette que je vais rajouter à la page-.
SupprimerLa force du minimalisme quand les mots se placent si justement. Merci, Annick.
Merci Adamante, je vais lire à tête reposée cette belle série
RépondreSupprimerJuste
- des crapaud griffus - vient en seconde ligne mais mon envoi a peut-être été mal imprimé, et donc je m'en excuse
Bisous
Problème d'administration... résolu. Bonne lecture, Marine.
SupprimerCiel haché de bleu
RépondreSupprimer- si bien derrière la vitre
quand tu es là
http://lacachetteajosette.blogspot.fr/
Un vrai bonheur que ce haïku qui nous plonge dans les profondeurs de la tendresse. Merci Josette.
SupprimerJ'aime infiniment la nuit, si inspirante notamment pour coller...
RépondreSupprimerTous ces textes, chacun à sa manière illustre à merveille cette belle image.
http://www.emmacollages.com/2015/07/coller-la-nuit.html
Je partage ton goût pour la nuit, la qualité de ses énergies quand tout le monde dort, pour créer.
SupprimerA la lecture de cette riche page, à l'écoute de cette chanson de Roger Caussimon (j'aime) je me souviens des "Gouttes de pluie" de Chopin. Permettez-moi de partager un de mes articles rédigé en Juillet 2013. Belle la musique de Chopin. Intéressante la version de George Sand !
RépondreSupprimerhttp://lesmelomanesreunis.eklablog.com/gouttes-de-pluie-chopin-a94408228
Bonne journée
Merci beaucoup. Je n'aime rien tant que le partage, et celui-ci est formidable. Belle journée.
SupprimerMerci Adamante ! Je relis avec autant de bonheur. Je suis bien de l'avis de ceux qui trouvent que la nuit est le meilleur des moments pour la création ! Plus précisément, le petit matin quand tout dort autour de soi ! C'est le moment que les oiseaux choisissent pour communiquer d'ailleurs !
SupprimerMagnifiques écrits, j'admire la diversité des propositions reçues, comme toujours.
RépondreSupprimerJ'ai beaucoup aimé.
Merci, Adamante, pour cette nouvelle page.
Quand la photographie est poésie
RépondreSupprimerla poésie devient photographie des coeurs.
De beaux est envoûtants poèmes merci à tous et à toi Adamante
Merci à toi et à toutes, cette aventure me comble au-delà de toute espérance.
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