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dimanche 9 avril 2023

La page 225

 


La petite fontaine. Photo Martine MR





La petite fontaine oubliée



Perrette, statufiée,

Rêve à tout jamais

Au pied de la petite fontaine

Vieille d'un siècle d'autrefois


Au marché elle allait vendre

Son lait

En espérait cent oeufs

Et triple couvées, donnant poulets

De quoi acheter cochon

Puis vache et son veau

A en devenir cheptel


La suite de l'histoire est connue

À trop sauter en chemin...


Perrette, statufiée

Rêve à tout jamais

Au pied de la petite fontaine

Vieille d'un siècle d'autrefois


Combien de Jean

passent encore la saluer

Cascade moussue



jill bill















 

Puiser de son eau

à l’ombre de la fontaine –

le fil de la vie

 

***


L’eau se colore

sous le poids du passé

-       teinte du temps

 

***


À la claire fontaine

sa dernière corvée d’eau

servante statufiée


un mince filet coule

clepsydre des ans


***


D’une fontaine à l’autre

la candeur des angelots -

jeu de cache-cache

 

peu importe le siècle

l’enfant s’amuse

 

 

 






La fontaine de Fleurette



La petite demoiselle de la fontaine

N'a pas de temps à perdre

Elle doit livrer son pot de lait

A une dame du palais


Elle aime se promener

Du côté de la fontaine

La tendre et si belle Fleurette

Quand viennent les mois d'été

Elle voit bien les regards en coin

Emplis de flamme et de désir

Quand passe un beau mousquetaire

L'épée au flanc, le chapeau en bataille

Le verbe haut à l'accent de Gascogne


Mais c'est à Henri qu'elle pense

Quelle a vu au château de Nérac

Jeune et sémillant trousseur de jupons

Galopeur de landes, de chemins et de combes

Il lui a conté fleurette,

Elle ne pense qu'à lui, depuis...

Ils se donnent des rendez-vous galants

Auprès de la fontaine

L'idylle se prolonge

L'amour emplit tout son être


Mais le futur Henri IV

a plus d'un coursier à fouetter

une couronne l'attend à Paris


C'est dans la fontaine

que Fleurette noiera ses larmes

et ses regrets



@marine Dussarrat

   



Une explication

 

Au château de Nérac, la Fontaine de Fleurette porte le nom de la fille du jardinier du roi. À 17 ans, elle s’était éprise d’Henri de Navarre (futur Henri IV) alors âgé de 19 ans.À la veille d’épouser Marguerite de Valois, Henri avait fixé rendez-vous à Fleurette dans le parc de La Garenne. Malheureusement le futur roi pour une raison inconnue ne vint pas. On dit que ce soir là, folle de désespoir, la jeune fille alla se noyer... Selon la légende, de cette histoire seraient nés les termes “Conter Fleurette” et “Fleureter” (flirter). Au XIXème siècle, le sculpteur Daniel Campagne a réalisé une statue en marbre blanc de Fleurette noyée pour orner le bassin de la fontaine éponyme. Marguerite de Valois qui aimait particulièrement se promener dans le parc le fit, à partir de ce point d’eau, prolonger de 3000 pas, aujourd’hui il s’étend sur deux kilomètres.









Ici des fontaines

aujourd'hui à l'abandon

apaisait la soif


des passants et voyageurs

vacanciers et va-nu-pieds




Fillette de la fontaine

as-tu longtemps à marcher

pour chercher ton eau ?


Chez nous elle coul' d'évidence,

à bonne température.




Une source, un puits :

Se construit tout un village,

et fait société.


Ainsi la Terre s'est peuplée,

et de toute éternité.

 


Une source tarie

c'est tous les gens du hameau

manquant d'essentiel.


Les enfants iront nu pied

loin jusqu'au point d'eau public.

 


©Jeanne Fadosi, jeudi 6 avril 2023









 

La Dame de l'eau


C'est un matin tout printanier où la fontaine du village glougloute toujours de son chant mélodieux. Notre proche voisine, Louise nous a quittés depuis peu. Louise, que nous appelions tendrement " la Dame de l'eau " , allait chaque matin, selon un rite immuable, rafraîchir ses mains et son visage sous le limpide filet d'eau.

" C'est ma fontaine de jouvence, allez-y les enfants, mouillez vos joues chaque matin et votre jour sera serein ! "


La source chante

L'hirondelle la frôle

Son image me sourit


L'été se fait plus sec et le débit recule mais nous buvons encore ses paroles très sages qui préservaient la vie.

" Surtout ne la gaspillez pas, usez d'elle avec parcimonie, avec respect pour notre terre " et nous l'écoutions bouche bée, toujours très attentifs.

Ma Dame de l'eau, je pense à vous aujourd'hui où la terre s'appauvrit, que les hommes persécutent et que demain sonnera le glas pour les plus démunis.


Une ombre passe

Tourne la roue de la vie

Que sera l'après ?


Balaline  08/04/2023



 



 La Fontaine des quatre dauphins


Ce poème-conte  m'a été inspiré par une balade nocturne en écriture autour des fontaines d'Aix-en-Provence organisée par un guide, il y a plus de 15 ans, l'eau coulait encore en abondance dans les fontaines. Une autre façon de voir les fontaines, la nuit...




Quatre dauphins rivés à une colonne

Figés et sans paroles

Se lamentaient du soir au matin

leurs nageoires caudales sculptées

à jamais à la pierre...


Ils pleuraient leur liberté

Entravée pour l'éternité

Par l'imaginaire fantasque

D'un sculpteur déshumanisé...


Quand, une nuit divine

La colonne à la triste mine

Se disloqua dans un fracas.


Qu'advint-il de nos quatre dauphins

heureux d'un si gracieux destin?


L'on raconte

Que des grenouilles

Sises sur des nénuphars

Se virent tapies

Comme des couffins

Au pied des dauphins

Ravis de ce miracle

Véritable défi à l'infini!


À fontaine merveilleuse, histoire fabuleuse!


Depuis lors, la fontaine glougloute avec délices!

 


 Ci-dessous,  pour illustrer le glou-glou, la photo d'une fontaine de la Drôme, du village de Montbrun Les Bains.




babil de la fontaine

jeux d'eau chantant dans la vasque

jaillissements graciles-


c'est la chanson de "l'eau vive"

au fil de "l'écume  des jours"


"l'eau vive", chanson de Guy Béart

"l'écume des jours", roman de Boris Vian


Claudie Caratini (Commentaires sur ce blog. Merci)

Le 08/04/2023







Ophélie


J’ai marché, quittant la ville et son présent pour le parc tant aimé. 

J’ai traversé des horizons ensorcelés jaillissant d’une sculpture de pierre, arrivant en un lieu où le temps, l’âge et l’espace furent soudain abolis.

Il a suffi d’un rayon de soleil, d’un sourire du printemps chevauchant le souffle d’une algue verte balancée de vent, pour que mon âme s’abandonne et que je fasse le voyage.

Une vasque m’a accueillie, rayonnante devant son rideau de lierre. Le doux chant d’Ophélie, se baignant avec les oiseaux, m’arrivait comme une cascade, en éclats lumineux de fraîcheur.  Sa longue chevelure entraînée par les eaux vertes débordant de la vasque tissait un écran irréel derrière lequel une statue drapée de mousse, figée d’éternité, semblait attendre un improbable miracle


elle était si jeune

la petite porteuse d’eau –

Ophélie dormait


le chemin se joue du temps

la romance est éternelle


Adamante Donsimoni 8 avril 2023 ©musicstart (sacem)





Une fois n'est pas coutume, j’ai invité Rimbaud sur la page


Ô pâle Ophélia ! belle comme la neige !

Oui tu mourus, enfant, par un fleuve emporté !

— C’est que les vents tombant des grands monts de Norwège

T’avaient parlé tout bas de l’âpre liberté ;


C’est qu’un souffle, tordant ta grande chevelure,

À ton esprit rêveur portait d’étranges bruits ;

Que ton cœur écoutait le chant de la Nature

Dans les plaintes de l’arbre et les soupirs des nuits


C’est que la voix des mers folles, immense râle,

Brisait ton sein d’enfant, trop humain et trop doux ;

C’est qu’un matin d’avril, un beau cavalier pâle,

Un pauvre fou, s’assit muet à tes genoux !


Ciel ! Amour ! Liberté ! Quel rêve, ô pauvre Folle

Tu te fondais à lui comme une neige au feu :

Tes grandes visions étranglaient ta parole

— Et l’infini terrible effara ton œil bleu !


— Et le poète dit qu’aux rayons des étoiles

Tu viens chercher, la nuit, les fleurs que tu cueillis,

Et qu’il a vu sur l’eau, couchée en ses longs voiles,

La blanche Ophélia flotter, comme un grand lys.


15 mai 1870

Arthur RIMBAUD  1854-1891



LE COIN DES RETARDATAIRES





La fontaine

 

Il est une source claire, évadée d’un trou bien caché. Elle bondit libre et si légère à la lumière de Phébus attendri. C’est qu’elle se languissait cette eau  au cœur du ventre ténébreux de la Terre. Seule la musique monotone d’un goutte à goutte lui tenait compagnie. Parfois un courant d’air intermittent  animait à peine son miroir.  Ou encore, plus brutal et soudain, l’éclat d’une roche  chutait provoquant des vagues concentriques. Et c’était tout! Quel ennui!

 

Temps fossilisé-

Geyser sans fin de spleen pour

L’eau cavernicole

 

Mais voici qu’un jour, ou plutôt une nuit pour cet esprit aquatique,  un grondement monta des profondeurs; se propagea de strates en strates, pour envahir, assourdissant, sa prison granitique. Fracas! Éboulement! Émoi! Puis, stupéfaction! Éblouissement! Bonheur! Une clarté fabuleuse venait de gommer l’opacité éternelle.  Ce petit tremblement de terre avait créé une fissure par laquelle le flot enfin libéré pouvait s’enfuir.

 

Au soleil-

Trilles sur trilles, le merle

D’écho en écho, la source

 

L’eau glougloute de contentement en émergeant entre deux mottes d’herbes.  Tout lui paraît extraordinaire: l’azur infini, la végétation, les insectes et animaux s’abreuvant à sa liqueur de vie… Joyeuse, elle va de découvertes en découvertes. Ru limpide, la voici filant, insouciante, au cœur du vallon alpin. En chemin, sa beauté pure est capturée pour ennoblir une ravissante fontaine. Parée de mousse  émeraude celle-ci sert d’abreuvoir et de piscine aux oiseaux  de la forêt toute proche. Cascadant aux lèvres de ses vasques, l’onde, nullement bridée,  poursuit sa route vers l’inconnu à explorer.

 

Azur scintillant-

Piste jalonnée d’arbres

Celle du ruisseau




 

9 commentaires:

  1. Bine agréables que toutes ces fontaines, et jolies réfences Claudie, merci à tous, amitiés, JB

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  2. Ophélie comme Perrette ou Fleurette parle de cette fin funeste dans la soie d'une source mais l'eau est aussi bienfaisante, elle nous régénère, tout y est et cette page est un régal ! Merci Adamante

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  3. Fontaine, fontaine, comme j'ai aimé boire ce matin les mots offerts sur cette page !
    fable, conte, légende ils donnent tous envie de boire à ta source.

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  4. Bonjour, Adamante et les Brins

    La jolie fontaine de Martine a fait couler joliment nos plumes Merci à toutes pour ces textes au pouvoir de ressourcement!

    Claudie

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  5. Mon bonjour à tous les brins,

    En retard pour cause de problèmes informatiques. Mais me voici ce mercredi à me régaler à l'agréable fraîcheur de vos inspirations respectives. Cette petite fontaine a été photographiée dans les Hautes Alpes, chez un particulier, pas loin de Gap. Je suis heureuse qu'elle vous ait magnifiquement inspirés.
    Merci
    :)

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  6. Claudie,

    Ton petit conte m'a beaucoup touchée car, cette fontaine des quatre dauphins, je la connais bien. 11 ans passés à Aix, tu penses!
    Une conte ravissant et un tanka pour terminer avec ta couleur si personnelle. Guy Béart et Boris Vian. Écoutés plus d'une fois pour l'un et lu plusieurs fois pour l'autre.
    Merci Claudie pour ce délice.
    Gros bisous

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  7. Merci à vous Marine, Jeanne, Balaline à qui je laisse un mot ici, pour vos textes si agréables à lire et si bien inspirés, et merci à Claudie pour cette nuit de révélations fabuleuses. J'ai pris un grand plaisir à me laisser emporter. Merci à toutes.

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  8. Bonjour, Adamante et les Brins

    Je te remercie Adamante ainsi que Jill et Martine pour vos agréables commentaires.

    Bien amicalement
    Claudie

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  9. Bonjour à tous les brins
    Je suis très en retard pour commenter mais cette fontaine, sans doute un peu magique nous a poétiquement inspirées. Merci à toutes.

    Claudie
    Cette balade nocturne en écriture nous offre un autre partage des fontaines la nuit. Peut-être chantent-elles différemment !

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Merci de vos commentaires, ici et sur nos blogs respectifs. Adamante