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dimanche 31 janvier 2021

Page 170 L'Arbre creusois

 

L'arbre creusois - adamante -


Le vieux pommier n'en pouvait plus de tant d'années à le chahuter. La grande sécheresse de 1976 avait failli le voir périr prématurément et il s'était dit qu'il avait déjà bien vécu. Ses puissantes racines avaient puisé dans la source profonde dont la sortie s'est tarie cette année-là.


Chantent les oiseaux

au vent léger des ramées

quand la fraîche venait.


On l'avait greffé avec amour et savoir-faire aux premières années de l'autre siècle. Dans le mince espoir d'y voir revenir l'enfant né hors convenance de l'enfant chassée pour déshonneur. Une enfant conçue sans violence ni surprise, juste par escroquerie aux sentiments d'un fils de patron à la soubrette.


Les parents taiseux

n'avaient jamais su lui dire

combien ils l'aimaient.


C'était sa manière au grand-père de dire de loin à cette fille jadis maudite et à sa petite fille combien elles leur manquaient. Sculpter l'arbre en renforçant et en étirant à l'horizontale une des maîtresses branches.


deux solides cordes pour l'attache

Une planche rabotée

Juste le vent à balancer.


Le temps, la distance, le tempérament fier n'avaient pas permis les retrouvailles mais la maison et son lopin était revenus à ces enfants. Et la balançoire, si elle a bercé la jeune femme devenu adulte, a surtout fait le bonheur des générations suivantes.


La vieille branche grinçait

les jeunes riaient et dansaient

aux doux jours d'été.


Par précaution il avait fallu la soutenir. Les compotes étaient toujours aussi délicieuses. Dis, Mémé Louise, ça vit longtemps un pommier ? Est-ce qu'elle souffre la branche quand elle grince ? Mémé Louise souriait. Viens. Nous allons aider ta marraine à éplucher les pommes pour faire une compote.


Longtemps le vieil arbre

traversera d'autres âges

et bien des orages.


La béquille est devenue un solide échalas. La planche et les cordes usées n'ont pas été remplacées. Un temps la maison a vécu des étés au rythme des vieilles et douces personnes qui l'avaient rachetée. Non loin la route a été élargie pour drainer la circulation vers l'autoroute en construction. La vieille dame n'est plus. Le vieux monsieur a revendu la maison. Le jardin a connu trop de tempêtes et de chaleurs et ses fruits ne régalent plus ni petits enfants ni de vieilles personnes.


Les bruits des moteurs

parviennent jusqu'à l'arbre las.

Que sent-il des mondes ?


©Jeanne Fadosi, samedi 30 janvier 2021


 








Au royaume des arbres chaque pousse a sa place à défendre, du sol au ciel, un véritable parcours du combattant.


Quelques torsions

pour rejoindre le soleil

l’arbre se sculpte


L’un droit comme un i grandit plus vite que l’autre. Le tronc du voisin, en contorsionniste, grignote sa part des rayons du soleil. L’arbre sculpte sa silhouette. L’astre du jour brille pour tous.


Courbes et révérences

leurs ramures s’entremêlent

en cousinage


Le plus fort n’est pas toujours celui que l’on pense, l’un est le chêne l’autre le roseau.  Les deux tentent de sauver leur place, en jouant des coudes, dans la hiérarchie naturelle. 


Bossu, tordu

sa vaillance le rehausse

sans lierre sur son tronc


Différent et beau par sa force de caractère. Sa simple volonté de trouer son passage l’ennoblit. Il s’incline, se redresse, pour chaque année offrir sa tendre verdure au ciel printanier. 


Toutes jeunes pousses

ne gagnent pas le gros lot

hasard et chance


d’une nature impitoyable

la faiblesse tue


ABC








P'tit Chêne



Il est un lieu, loin, très loin, où pousse une petite forêt. Parler de forêt est peut-être excessif  car les gens du coin la nomment « Le bois sans nom ». Pour y parvenir il faut traverser prairies, ruisseaux et marécages; des ronciers imposants; une mêlée inextricable d’herbes hautes et d’arbustes exubérants.


D’hiver à l’automne

Sur la carte routière

Une tache verte


Cette sylve, si difficile d’accès, est préservée des hommes et de leurs cognées; des voitures 4X4 et du hurlement des motos tout terrain.


L’ombre des arbres

Leur noirceur si effrayante

Chape de silence


Mais, ce n’est qu’une apparence, un leurre de Gaïa. Car, derrière ce rideau inquiétant, tout un monde saute, court ou rampe. Le lapin d’Alice secoue  sa montre gousset  en se lamentant bruyamment: « En retard ! Je suis en retard ! ». Alice aussi est en retard… d’une histoire. Deux gros escargots unissent leurs destins tandis que le concert des grillons couvre leurs ébats. Bambi parle à une pervenche au bleu irréel. Et l’ours Baloo  compose une berceuse pour Mowgli. C’est un autre monde où le merveilleux règne en maître. Où les arbres ont le don de parole. Tenez, justement, j’en vois un qui se penche pour mieux écouter la chanson de la vie.


Harmonie dorée-

La ronde des champignons

Celle des mouches

 

P’tit Chêne à la voix flûtée

Se joint au merle siffleur

 

Martine Madelaine-Richard





 





Dieu qu’il fait chaud.  Le soleil inonde la prairie.  L’herbe roussit. Il en tremble encore d’effroi


                                  Devant son seigneur

                               Il en tombe à la renverse

                                 Pas moi, non pas. Non.  


Mais l’autre impassible monte droit dans ses bottes, impassible dans l’enchevêtrement de tous ses bras, à droite, à gauche


                                  C’est comme un combat

                                  Silencieux  et  tout en vert

                                    Le plus fort vaincra.


Et sous cette chaleur écrasante, chacun puise en terre la force de tenir bon.


Françoise  - 29 janvier 2021.

                               



Il chante, l'arbre creusois




L'Eléphant Man

Le bancroche du p'tit bois

Pour un Caruso se prend

Vocalise tel un oiseau...


DO creusé en mode chant
RE cital oblige
MI se en scène, hors planches...
FA ble ! Me dira le bête incrédule
SOL ennel il est
LA au p'tit bois,
SI tu doutes de mes mots
DO
 ute de dame nature, aussi,


Dommage, pour ton âme d'enfant...



L'arbre mélomane

déformé dans ses dix formes

n'en veut pas aux vents



Vents qui l'ont façonné ainsi

Lui le plus faible,

Lui, le survivant, pourtant,

La fratrie, solide, a connu la hache...


Il remercie le ciel tout compte fait

De l'avoir fait chétif, malléable

Par le souffle des bises,

L'indifférence du bûcheron

Comme une grâce...



Do, ré, mi, fa, sol, la, si, do

Docile face à son sort, il chante

L'arbre creusois cambré




jill bill





 

Une graine germa ...


Naître, grandir, lutter contre l'adversité, les vagues hivernales, les vents tempétueux, les étés assoiffés, le bras du bûcheron et l'approche des heures. 


Petite graine immature

Un jour risquer un oeil

Respirer la lumière

Ouvrir son coeur au monde


Tu seras un chêne mon fils, humble maillon des grands de la chênaie où vient bramer le cerf, roucouler la palombe, folatrer le chevreuil. 


Enroulé le destin

Sur un rameau fragile

Comme un anneau sacré


Être arbre enfin

sous les pluies de joies printanières, sous les pluies de pleurs automnales

Être arbre toujours

compagnon de silence et frère de nos vies


Balaline (en parcourant les Causses Quercynois)


 




 

Puissant sous les claques du vent

Au milieu de la forêt profonde

Sous l'arbre de vie

Le chant du poème

Ne suffira pas

Nous errerons

A la recherche du sens

Tournant en rond et nous perdant

Pour trouver la paix du cœur

Une réponse à nos questions


Quel monde aurons-nous, demain ?


Tout est bruit et silence

Qui assourdissent

La pierre reflète les saisons

Elle n'a pas de mélodie

Pas de frissons


Il faut attendre des mots légers

Comme des plumes détachées

A distance des mensonges


Marine







L'absence

 

Entre terre et ciel

sa branche courbée

file au loin


Je me suis assise, à l'ombre des genêts. J'ai repris un à un tes silences et tes mots.

J'ai questionné l'azur et le vent, qui m'ont dit de patienter.

Dans les branches enchevêtrées, un oiseau s'est perdu. Ses ailes affolées ont fait tomber des feuilles. Il piaillait, s'énervait, et soudain, il s'est envolé, libéré.


Azur apaisé,

la branche a craqué.

et toi, où es-tu?


Annette





Regardez, il danse ! 



Je l’ai croisé un jour d’été. Elfe ou Farfadet ? Il m’est apparu au travers du feuillage l’arbre en forme d’arc-en-ciel. En le voyant ainsi incliné, je me suis dit : il danse.


que salue-t-il donc

l’esprit discret du feuillage

le printemps qui vient ?


Tout s’efface et s’enfuit, les vieux arbres ne sont pas éternels. Les ans ont marqué son écorce comme les rides le visage


que raconte-t-il

l’esprit qui vit dans l’arbre ?

le rien, sans mot


Si le vent porte longtemps la voix des enchanteurs, un pincement discret, cicatrice d’un passé heureux si vite disparu, serre le cœur quand on les écoute. Nous avons tant de points communs


l’esprit de l’arbre

chante sa chanson muette

au vent qui passe


il s’incline doucement

la terre et le ciel scintillent.


Adamante Donsimoni









 









10 commentaires:

  1. Bonsoir l"Herbier... C'est vrai qu'il a quelque chose du danseur, du ténor cet arbre cambré... en tous cas il a su se faire remarquer et aimer de nos plumes... ,-) bonne nuit les brins ! JB

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  2. Bonjour Adamante ainsi qu'à tous les brins,

    Ce petit arbre a beaucoup de personnalité. Il a su gagner les cœurs et inspirer de beaux textes. Quel plaisir que ce rendez-vous. Merci
    :)

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  3. Un petit arbre qui a fait couler beaucoup d'encre, et ouvert la porte au royaume des contes...

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  4. Sa forme étrange, tourmentée ne nous laisse pas indifférents, meri pour ce chant de l'arbre que nous aimons écouter...
    J'ai repris
    http://emprises-de-brises.over-blog.com
    Bises Adamante

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  5. J'ai aimé aussi le texte de Annette, pas de lien pour le lui dire

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    1. Non, je n'ai plus de blog en cours... Mais je suis venue, et j'ai lu. Merci à toi.

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  6. Je ne voudrais pas être mauvaise langue mais je trouve que cette drôle de période nous va bien ! Les brins de L’Herbier sont de plus en plus en progrès l le haiboun n’a bientôt plus de secret pour nous. Olé !
    Mon amitié à tous, même si je ne peux passer dans vos domaines autant que je le souhaiterais.....

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  7. Un enchevêtrement et des formes torturées qui ont fait danser les brins d'herbier.
    Un vrai plaisir ce rendez-vous d'écriture.

    NB important, le lien mis à la place de la complainte du vieux pommier est à supprimer. Il ne mène en apparence nulle part et j'espère que c'est bien le cas.
    A toutes fins utiles voici le bon lien :
    https://www.youtube.com/watch?v=UHYb7as8wuI&feature=emb_logo&ab_channel=LucAlenvers

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  8. Nous aimons les arbres et aujourd'hui ils nous ont joliment inspirées par leur grâce, leur passé, leur histoire, leur énergie et leur survivance.
    Merci Adamante, merci les brins pour cette belle page en partage.

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Merci de vos commentaires, ici et sur nos blogs respectifs. Adamante