Vor der Bäckerei - Alvaro De Taddéo
"Devant la boulangerie"
Souvenir
d’hier, rêve d’aujourd’hui :
Le
bonheur de cet hiver d’enfance ne fut pas tant la beauté de la vitrine, que
nous contemplions en gourmandise, que la joie du partage.
Sur
le chemin de l’école nous étions deux ne faisant plus qu’un, complices sereins
et joyeux.
L’hiver
a fait place au printemps. L’été est venu. Tu es parti. Je suis restée.
Une
à une, les années se sont écoulées et, quand tombe la neige, devant cette même
vitrine, qui n’a pas beaucoup évolué, je me demande encore, je me demande
toujours, si tu m’as oubliée.
Tatiana et Anatoli
Bottillons ou bottes
Fuseau,
Bonnet à pompon ou toque
Blouson,
Gants ou moufles
Écharpe...
Image hivernale
Vitrine pareille,
Chez la vieille Rufina
S'achète
En pain d'épices
Maison et bonhomme,
Couronne et lanterne
À mettre à sa porte
Une nuit bien particulière...
Ça fait rêver
Tatiana et Anatoli
Sur le chemin de neige,
Ça fait mettre en retard
Anatoli et Tatiana
Sur le chemin de l'école...
Le cartable aux leçons
N'a rien d'un enchantement
Mais seule la bonne note
Reste payante...
J'aimerais ça, dit Anatoli,
J'aimerais plutôt ceci, dit Tatiana
Fête de la Saint Jean
Solstice d’Été
Phase descendante
Les jours les plus longs
La nuit la plus brève
Les musiques claironnent à l’ombre des
tilleuls
Parfum de roses et sorbet à la fraise
Nous voici à mi-chemin de l’année
Fête de Noël
Solstice d’Hiver
Phase ascendante
La nuit la plus longue
Les jours les plus brefs
Dans la froidure venteuse d'une rue
deux écoliers
Devant le kiosque à gourmandises
Hansel et Gretel
Rêvent de la maison en pain d’épice
Paysages
d’hiver
Des
enfants emmitouflés font du lèche-vitrine d'hiver
William
Turner a peint Hannibal traversant les Alpes sous une tempête de neige
Maurice
de Vlaminck glisse du fauve rouge et du soleil orange dans un paysage semblable
J’ai
un gros faible pour Pieter Bruegel l’Ancien « Les chasseurs dans la
neige. »
Je
voudrais aller voir Argenteuil peint par Monet, recouvert d’’un blanc
d’hermine
Alfred
Sisley a choisi Louveciennes que je ne connais que par les impressionnistes
James
Mac Neill Whistler me fait voir Chelsea en hiver, la neige d’Angleterre.
Gauguin
me fait revoir la Bretagne de mes aïeules hors de l’été de ses
plages
Albert
Lebourg m’emmène sur un pont figé de glace en Auvergne voisine
Camille
Pissarro me conduit dans un Pontoise enneigé aux couleurs froides
Mon
admiration va enfin à Friedrich qui romantise un cimetière de monastère
En
mode optimiste au souvenir du bonheur d'un petit bonhomme de deux-trois ans
auquel on avait appris à se régaler du regard devant les vitrines sans réclamer
et cela marchait.
Les pieds dans la neige
béats devant la vitrine
émerveillement
Qu'il est doux de ranimer
la mémoire de l'innocence
En
mode fataliste en contre-point de l'image de la page 76
Sur l'autre trottoir
la petite mendigote
s'offre au doux soleil
indifférente au spectacle
dont elle est partout exclue.
et
en illustration sonore la comptine dont je n'avais en mémoire que le premier
couplet et à laquelle la vitrine m'a fait immédiatement pensé
et
en référence "littéraire" Hansel et Gretel des frères Grimm, à
cause de la maison en pain d'épices de la sorcière :
Épiphanie
de boulangerie
Dans
la chaleur de nos bonnets,
Par
les ruelles, en robes enneigées,
Nous
allions : au chaud, emmitouflés.
Et
l’école nous lassait de sa cloche trop molle :
Par
pitié, quelques minutes de joies folles.
Au
dos, ballottaient nos cartables de cuir,
Certes,
bien usés, mais si fraîchement cirés.
A
nos mains, des moufles par nos mères tricotées.
Nos
bottes trop serrées, étaient encore de l’an passé,
Mais
elles glissaient à merveille sur les flaques gelées….
L’école
nous appelait d’une cloche trop molle :
Du
rêve, quelques instants encore, par pitié!
La
chaleur d’un four et puis l’odeur des farines,
Douceur
du sucre Candy, mie tiède de la fraiche boulange :
La
vendeuse, pâlie de pains blancs nous semblait un ange.
Les
vitrines, de Saint Nicolas aux veilles de Noël,
Éveillaient
des rêveries de sel, des tourments irréels.
Devançaient
de rêves de fêtes, d’illusions de goûter.
Délices,
oh oui, délices lointains, tant convoités !
L’école
nous appelait d’une cloche trop molle :
Par
pitié, quelques secondes encore d’éternité.
Que
de fous rires sur nos chemins frivoles d’écoliers
Qui
gonflent, encore, comme des pâtes à double levée,
Yeux
ébahis, doigt fixé, je me souviens d’extases
Nous salivions
à une crèche, à une chaumière au toit de gaze,
Savourions
sans morsures, derrière leurs papiers des figures
D’évêques
en pain d’épices, lissés de blanches glaçures.
Des
peuples de « Mannela »* aux boutons de Corinthe.
Qui
arrachaient à nos cœurs de si joyeuses plaintes.
L’école
nous appelait d’une cloche, soudain, folle :
Arrêtez
l’heure, par pitié, tuez le temps!
Frère
et sœur, dans une semblable gourmandise :
Nos
désirs et nos rêves, se suffisaient à de simples odeurs
Nous
savions vivre en ces temps de délices non consommés.
L’école
a fini de nous héler de sa cloche trop molle :
Courrons,
courrons, le maître va, encore, nous gronder !
*Petit
bonhomme à base de pâte briochée qui se mange pour la Saint Nicolas, dans tout
le bassin rhénan et représente les enfants de la légende liée à cette fête.
Reflets d'enfance
Sur la vitre bien trop lisse
où se mêlent les reflets
d'une enfance trop dorée,
où dort la part de rêve ?
D'une cage grande ouverte
sur les senteurs poivrées
de chemins et de prés,
de tartines en partage
dans les rires d'un goûter,
de secrets échangés
à la sortie des classes,
de petits riens tout simples
en bordure des jours,
de la beauté des choses,
des choses vraies,
enfin !
Le
désir.
Qui
regarde qui ? Les enfants, en arrêt devant les figurines de la vitrine qui
orneront peut-être une crèche ou un sapin pour magnifier la fête de Noël ;
ou l’âme des figurines immobiles qui les interpelle sans mot ?
L’écoute
de leur silence fait se pointer le doigt de la gourmandise. Pour eux, le temps
s’est arrêté. La magie de l’instant éternel opère, le désir s’installe. L’empreinte
de la friandise convoitée se fixe à tout jamais dans le cœur indestructible de
l’enfance.
L’œuvre
d’art ne participe pas du vouloir faire, mais du laisser être. Elle témoigne.
Elle plonge l’observateur comblé dans la vibration d’un non agir créateur.
Je
reçois donc je crée par la redécouverte de moi-même, par le retour à la source
primordiale.
Ici,
mon enfance, délicieusement parfumée de miel et d’épices, déploie ses ailes.
Une illustration rafraîchissante quand juin est là avec son soleil généreux, bravo à tous encore une fois, au plaisir Adamante, jill
RépondreSupprimerJ'ai trouvé que cela nous ferait du bien :-))
SupprimerJe pensais avoir envoyé mon petit texte...
RépondreSupprimerj'ai du zapper (après vérification de mes envois, il n'y est pas)
Il est sur mon site où je l'avais prévu pour ce matin
Désolée!
A toi de voir si tu veux que je le rajoute dans la rubrique retardataires. Il te suffit de me l'envoyer sur la boite mail et je le rajouterai dès que j'aurai 5mn ;-))
SupprimerUne page gourmande qui fait saliver, Noël est encore loin, mais naissent une à une les saveurs de l'été que l'on peut respirer aux étales des marchés...
RépondreSupprimerUn massepain de souvenirs...
SupprimerUn délicieux palais de poésies et de rêves de voyages dans le temps ou dans l'espace.
RépondreSupprimerC'est tout à fait cela, quelque chose de la permanence malgré le temps qui passe.
SupprimerVoici les petits fours du vendredi, juste dorés et mis en vitrine. Qui veut celui-ci, qui veut l'autre ? Il y en aura pour tout le monde. J'en ai même vu l'un ou l'autre, me faire d'étranges clins d'yeux.
RépondreSupprimerMerci à la boulangère pour l'ordonnancement de nos petites douceurs.
Moi qui ai mis cette page en ligne, comme d'habitude, il me faut la découvrir et la déguster lentement pour en débusquer toutes les saveurs, sans autre souci que de lire et d'apprécier ;-)
SupprimerJ'apprécie cette poésie, même si elle se joue avec virtuosité de la règle de l'herbier qui exclue toute forme de rime. Elle est sacrément bien contournée;-)
SupprimerLa rime s'invite puis s'échappe, la coquine !
Pain d'épices ou choux à la crème, tartines et chocolat, nostalgie de ces rituels endimanchés au bon goût du temps où l'on prenait le temps !
RépondreSupprimerMerci à tous.
Merci pour cette page, panne d'inspiration et fatigue, peut-être un peu hors saison pour moi, en tout cas j'ai aimé, surtout Dame Tartine...
RépondreSupprimerBises Adamante
C'est une page magnifique... J'ai déjà lu certains des textes chez leurs auteurs, mais j'ai tant de retard !
RépondreSupprimerMerci pour ce sujet, Adamante.
Passe une douce journée.