Cette semaine je propose à vos mots une toile d'un peintre que j'aime par dessus tout, Edvard Munch.
À mardi donc, et pourquoi pas en haïbun qui allie prose et haïku ?
À vous de voir...
Pensez à remettre vos textes pour lundi dernier délai.
Edvard Munch - Galopperende hest [Cheval au galop], 1910-1912
Huile sur toile, 148 x 120 cm - Munch-museet, Oslo, Norvège
"Si la peinture d’Edvard Munch témoigne d’une volonté de
retranscrire une vision intérieure et de s’éloigner du rendu fidèle de la
réalité optique, celle-ci va, paradoxalement, trouver dans les nouveaux
appareils optiques tout un registre de déformations qui permettront à l’artiste
d’amplifier l’expression de la subjectivité.
Dès 1882, alors qu’il est encore étudiant, Munch aurait eu
recours aux dispositifs de la camera obscura et de la camera lucida25 pour
composer ses perspectives. En exacerbant les effets de loupe qui caractérisent
les images saisies à l’aide d’objectifs grand-angle, il amplifie les
déformations naturellement produites par l’œil humain et souligne le point de
vue adopté. C’est moins la vue du paysage qui est mise en évidence que le
regard de celui qui voit. Le caractère subjectif du point de vue, dramatisé par
l’amplification des perspectives, souligne la dimension existentielle de la
présence du regardeur au monde, irrémédiablement seul en son centre.
C’est ainsi que dans Cheval au galop, de 1912, le réel
surgit à la face du spectateur sous les traits d’un animal en pleine course :
la perspective enneigée, de même que la trajectoire du cheval et l’œil que
celui-ci tourne vers lui, pointent dans sa direction. Aussi, n’est-ce pas un
hasard si l’emplacement de l’œil correspond à celui du point de fuite, si l’on
devait en placer un.
L’effet produit par ce surgissement n’est pas sans rappeler
celui d’un autre cheval, à vapeur celui-là, qui nourrira la légende des
premières projections des frères Lumière. Bien que le cadrage du plan de
L’arrivée d’un train en gare de la Ciotat, tourné en 1895 et projeté en 1896,
soit bien différent, la toile de Munch atteste, par la mise en scène
spectaculaire du mouvement qu’elle suggère, de l’intérêt que l’artiste accorde
également à la représentation cinématographique."