Songerie
Un coursier qui se cabre
Se rebelle
Contre quelconque dressage
Liberté sacrée
Sauvage dans le sang...
Cheval de l'île de Sable
Crinière au vent
Dune et mer pour paysage...
C'est beau grand-père
L'imagination !
Tu vois petit
C'est ainsi que naît un conte
Il était une fois, dans un morceau de papier...
Emballage froissé
donne vie à une historiette
Grand-papa gâteau
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Et voilà
On m’a dit d’écrire un poème sur cette tache
Une salissure nichée dans le creux d’un mur fissuré
Je l’ai regardée longtemps, très longtemps
Puis j’ai vu des mots qui voulaient sortir, sans savoir comment
Je les ai saisis, grattés, poncés jusqu’à l’os
J’ai badigeonné mon poème sur la tache
Six vers pour si peu
Une éponge aurait fait mieux
mais moins joliment.
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* 💚 *
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Au bord de la falaise
Nez en l'air, souriceau hésite à piéger ses poursuivants :
la branche entamée semble bien fragile à sa base.
Tiendra-t-elle même sous son tout petit poids ?
Il sent le souffle de ses prédateurs dans son dos.
Face au précipice,
à sa poursuite deux matous
frêle rameau sauveur
L'un a vu le gouffre. Il recule, stoppant l'autre.
Qui murmure dans un discret miaulement
- Ce n'est pas l'heure d'un câlin !
- Non ! juste notre dernière heure.
Et nos deux compères
qui ne sont pas téméraires
reculent prudemment.
©Jeanne Fadosi, mardi 17 juin 2025
En bonus musical grinçant et impertinent (ma belle-mère détestait ...)
Steve Waring - Le matou revient - chanson pour enfants
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Vagabond :
Depuis toujours les gens l’appelaient la plage du vagabond, vieille histoire d’autrefois qui au fil de l’eau et du roulement de la marée, sur le sable, est devenue légende, au gré des souvenirs des anciens.
J’ai toujours entendu dire que personne ne savait comment il était arrivé là à cheval, comme un cow-boy solitaire, son vieux chapeau fixé sur la tête. Chaque soir à la tombée de la nuit il parcourait la plage sur sa monture en fixant l’horizon, puis il disparaissait pour revenir le lendemain.
l’intrus de la plage
son cheval et son chapeau –
les langues vont bon train
Un beau matin d’été, sur la plage déserte et le sable chaud, il ne restait que son chapeau et couché sur le flan sa monture regard tourné vers le grand large. Lui avait disparu avec la marée et le souffle du vent. Jusqu’à son dernier soupir son cheval est resté là en perdition. Personne ne sut jamais d’où il venait, ni pourquoi il s’était comme évaporé, les gens usèrent beaucoup de salive pour lui inventer une histoire. On dit que sur le sable restèrent toujours gravées son empreinte et celle de son canasson.
Adieu vagabond
tout au long de la plage
ta légende galope
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Séisme
Le sol a tremblé,
Le roc est fissuré,
La montagne est ébranlée.
Au bord de l'à pic,
Quelques fragments de roche restent en suspend...
Tombera, tombera pas ?
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L’élégance bafouée
Le marbre, vision de Adamante
Promet un sol froid
Puis chaleur diffuse
Mais le mien est un écran opaque.
Ici sous nos pieds, la pierre rêvée, veine sombre et claire comme des rivières de passé, se transforme en farce. Un lino, vulgaire toile de navire échoué, masque un chauffage au sol qui rêve de réchauffer. Oh, l'économie de pacotille ! Matériau non conforme, barrière thermique, ma douce chaleur s'étouffe avant même de naître. L'immeuble soupire, vieil homme cacochyme, ses murs fardés de misère, tandis que je grelotte, riant jaune de cette absurdité. Le collectif s'écroule, les promesses s'évanouissent, et le marbre de mes songes ne sera jamais qu'une image, lointaine et moqueuse.
Hiver sans fin
Sous mes pieds, le chaud s'éteint,
Lino, quel blague !
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* 💚 *
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La fée Aconit
Le soleil a déchiré les voiles de la nuit. Phébus impose sa marque, cisèle de son glaive brûlant l’armée immobile des buissons épineux, efface les ombres, débusque les secrets de la sorgue*
Matin estival-
merles, grillons et criquets
concert impromptu
La lumière révèle la trace sinueuse de P’tit gris en quête de douce salade, une touffe de thym grignotée par Lapin, quelques cistes meurtris par la fuite d’un chevreuil.
Et puis… et puis… imprimée dans le granit du Roc du Castel, entre deux fissures, l’empreinte charbonneuse de la fée Aconit retient l’attention. Cette magicienne sonde les cœurs de tous ceux qui s’approchent des ruines de son château. Aussi promeneur, prends garde! Seules les âmes vaillantes et charitables peuvent passer sans danger A bon entendeur, salut!
conte du dimanche
que racontait grand-maman-
Souvenir d’enfance
.
*Sorgue: autre nom pour désigner la nuit
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Ma poule couleur ardoise
Je découvre Blackotte qui picore un gros morceau sur la barrière en bois. Intriguée, je m'approche, quelle proie a-t-elle déniché ?
Un gros insecte
au ventre rebondi
est à son menu
Elle cherche sans arrêt quelque chose à se mettre dans le bec, quelques vers qui font ses délices, elle gratte, soulève, grignote, nettoie avec ses pattes, furieusement et avec plaisir, tout ce qu'elle trouve au jardin…
Une fois rassasiéetu me donneras un œuf
et moi des graines
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* 💚 *
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Saisir le temps
Ils marchaient dans la rue sans regarder autour d’eux, soucieux d’idées occupant leurs esprits agités. Certains sautillaient, oublieux de l’ancrage, stressés, déracinés, fragiles ; d’autres traînaient leurs semelles comme s’ils voulaient en abandonner une partie au bitume, ceux-là sans doute, épuisés par leur vie, eussent voulu ramper, tracer leur chemin en sous-sol pour se faire oublier ; les enfants quant à eux piaillaient en agitant les bras comme pour chasser ces boisseaux d’ombres émanant de l’univers adulte polluant l’espace.
Moi j’observais la rue, j’en captais les moindres détails. C’est alors qu’une femme tirant un lourd caddie, perdue dans ses pensées, et sans doute pressée de regagner son foyer, me frôla. Elle s’excusa. Nous échangeâmes un sourire puis elle s’éloigna.
Cette halte, à moins que ce ne soit ce sourire, m’entraîna dans une dimension parallèle.
Face à moi, sur le mur d’un ancien garage désaffecté, je le vis surgir. Mais qu’était-il ? Je découvrais un cheval à tête de dragon accompagné d’un moine, sans tête, dont le bras semblait lui interdire mon approche. Je percevais la fougue, voire la rage, lorsque je crus entendre claquer les dents de cet étrange destrier, des dents qui semblaient désireuses de dévorer le monde qui était le mien, ce monde arrivé à épuisement à force de destructions, à force de mépris du naturel.
Je restais là, interdite, ne sachant plus où moi-même je me situais. Avais-je passé une frontière interdimensionnelle ? Et cette vibration exaspérée, face à notre comportement irresponsable, n’indiquait-elle pas, plutôt qu’une menace, le désespoir d’une autre forme de vie plus empreinte de sagesse ?
Étrange sensation que de se perdre dans un espace aussi incertain que celui-ci.
Le vrai le faux - le flou
l’indéfini du temps
vérités multiples
au cœur des no man’s land
tout parait si insaisissable.
Adamante Donsimoni - 20 juin 2025
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